Les coulisses d’une impression en sérigraphie


Aujourd’hui, je vous ouvre la porte de mon atelier de poche pour vous faire découvrir le (long) procédé d’un impression en sérigraphie 4 couleurs.

Primo :
Il vous faut visualiser en esprit l’image à venir, le nombre de ses couleurs, et la manière dont celles-ci se décomposent en écrans (un écran, c’est un cadre en métal rectangulaire tendu de tissu synthétique de maille très fine. Ces écrans serviront de « pochoirs », afin d’imprimer les motifs sur le papier). Cette étape de séparation des couleurs est cruciale et nécessite une bonne gymnastique mentale. Je procède à de multiples esquisses avant de déterminer quelle est la meilleure solution de combinaison de couleur, et aussi dans quel ordre les imprimer.

Secundo :
Passer aux esquisses, et à la réalisation au propre du motif, en n’oubliant pas de faire un dessin…par couleur!

Une fois ces dessins réalisés (4 dans le cas de cette image, puisque il y aura 4 écrans pour 4 couleurs), je les numérise afin de les nettoyer sous Photoshop, avant de les imprimer sur des supports transparents nommés « typons » qui vont servir à l’étape de fabrication suivante : l’insolation des fameux écrans.

Tertio :
L’insolation des écrans, un à un, of course ! Je réalise cette opération grâce à mon insoleuse, caisson en bois équipé de néons UV. La veille, j’ai pris soin de travailler sous une lumière inactinique (comme dans les labos de développement photo) afin d’étaler un produit puant des deux côtés des écrans pour les photosensibiliser, c’est à dire de les rendre sensibles à la lumière.
Les typons vont, grâce à la lumière, se « graver » dans la maille du tissu.

Et après, me direz-vous? Hé bien, il est temps de passer aux choses sérieuses : l’impression !

Quatro :
L’impression. Tout d’abord, il faut préparer chaque couleur d’encre, en les mélangeant soigneusement, comme une pâte à gâteau, afin d’éviter les grumeaux.
Puis, il faut procéder « couche par couche » pour l’impression. On utilise d’abord le cadre N°1 et on imprime l’ensemble des feuilles de papier (pour ce travail, de 61 exemplaires au final, plus de 75 feuilles auront été imprimées puis triées). Puis on démonte l’écran de la table d’impression, on le lave, on fixe l’écran suivant sur la table, et c’est parti pour la couleur N°2, on ré-imprime toutes les feuilles, puis c’est le tour de l’écran N°3, et de l’écran N°4…vous l’aurez compris, la sérigraphie est un travail de longue haleine, puisque qu’à chaque couleur, la feuille repasse dans les mains, encore et encore.

Mais comment que l’on met donc la couleur? Hé bien, mes amis, la sérigraphie, c’est racler, racler, racler…On étale l’encre sur l’écran avec la racle, puis, d’un geste gracieux, précis et suant, on racle bien fort en appuyant, faisant ainsi passer l’encre à travers le motif gravé sur l’écran, à la manière d’un pochoir, vous dis-je ! Mais, c’est long alors? Oh ouiiiii !
Faisons un petit calcul rapide : j’ai imprimé 75 feuilles, avec 4 couleurs (écrans) par feuille. Mais, MAIS! (il y a souvent des « mais » en sérigraphie). Certaines couleurs sont retorses, les coquines ! Pour le doré, j’ai dû napper et racler pas moins de 3 fois chaque exemplaire afin d’obtenir un beau doré couvrant et brillant à souhait (mais je suis une obsédée du doré, c’est peut-être un problème d’ailleurs).

Donc : 75 x 3 raclages pour le doré : 225 coups de racle
75 x 3 raclages pour les autres couleurs : 225 coups de racle
225 + 225 = 450 coups de racle pour venir à bout de ces damnées 75 feuilles!

Avantage majeur de cette technique archaïque mais tellement gratifiante : on se muscle les bras et les abdos gratos !

Et là, me dites-vous, c’est enfin terminé? Non, malheureux ! L’atelier vous devez récurer, les écrans dégraver un à un avec un produit « tête de mort », laver aussi le chat qui est devenu multicolore dans la bataille, vous laver vous, parce que vos cheveux ont une couleur aussi folle que ceux du Petit Poney Arc-en-Ciel, puis aller massicoter (couper) les tirages dans leur format définitif, avant de bien sagement les numéroter, les signer et les tamponner. Et là, oui, c’est terminé ! Ouf ! Jusqu’au prochain tirage…

Moralité : la sérigraphie, tu l’aimes ou tu la quittes.

Tirage à shopper sur https://www.etsy.com/fr/shop/Abeillefactory

Report de l'esquisse à l'encre de chine

Un typon sur la vitre de l'insoleuse.

Insolation d'un écran aux néons UV. Attention les yeux ! L'écran à été photosensibilisé au préalable grâce à l'application d'un produit.

Les 4 écrans qui vont servir au tirage, de gauche à droite : le feuillage bleu clair, les oiseaux en dégradé, les tracés bleu sombre des oiseaux, les touches de doré.

Préparation des encres, ici, les couleurs composant le dégradé des oiseaux.

Dégradé en 4 étapes : pose des couleurs sur l'écran, nappage, raclage, levage de l'écran pour récupérer l''exemplaire imprimé.

Nappage de l'écran pour l'impression des tracés bleu sombre des oiseaux.

Tadaa ! Les tracés sont imprimés !

Dernier écran à être monté sur la presse : le doré. On voit l'image imprimée sur le papier en transparence.

Calage de la couleur doré par transparence.

L'écran, tu napperas.

L'écran, tu racleras, et bien fort !

Hop, sur le fil, comme des chaussettes !

Tadaa ! Le résultat de tous ces efforts !


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  • Artaud Geneviève

    Pour un premier contact avec la sérigraphie cela m’apparaît super compliqué et devoir posséder un matériel important…..